On racontait que parfois on voyait le peintre danser dans son studio!
Il dansait en tenant son chevalet devant le tableau qu’il venait de finir!!
C’est ce que l’on racontait ,… mais seuls quelques uns croyaient à cette histoire bizarre.
Et voici qu’un beau jour de Mai, on finissait d’installer l’exposition dans le hall du théâtre.
Les tableaux étaient presque déjà tous suspendus sur les murs .
Les derniers, posés sur le sol, attendaient leur tour.
Et soudain, on vit le peintre commencer à tourner sur lui-même en chantonnant une mélodie sans paroles.
Il bougeait joliment les bras et frappait doucement ses talons en cadence sur le sol.
Les personnages sur les toiles se regardèrent en souriant. Puis ils commencèrent à rire et à s’interpeller.
« On y va? » dit le Baron.
« Allons-y » répondit immédiatement le Mexicain qui était adossé contre une colonne par terre.
Ils sautèrent devant le peintre, et en se tenant tous les trois les mains, ils commencèrent à tourner en cercle.
Les autres les rejoignirent rapidement, sautant de leurs cadres en rebondissant sur le sol, entraînés dans une ronde frémissante.
Le gardien et deux employés se glissèrent même dans le groupe en riant. Des spectateurs venus en avance s’approchèrent et à leur tour prirent place dans la ronde.
Le peintre était maintenant au milieu, les yeux fermés il faisait des arabesques avec ses bras. Tous chantaient en cœur et frappaient fort des pieds.
Pour chacun c’était une occasion unique.
Le directeur, alerté par le bruit, arriva en courant , essoufflé et couvert de sueur.
« Mais qu’est-ce-que c’est que ce cirque? « Aussitôt les gardiens et employés disparurent en silence , les spectateurs s’éclipsèrent vers la boutique de livres et le restaurant.
Les personnages se dispersèrent et rejoignirent leurs toiles en sautant .
Le peintre s’arrêta de tourner, prenant un air songeur en regardant le plafond.
« C’est bientôt fini? » demanda le directeur. « Oui, monsieur le directeur!
Nous avons presque terminé l’accrochage » repondit le peintre en feignant la surprise.
Pour tous ce fut une occasion unique.
Michel Koginsky
Jerusalem 2015- Sivan 5775